Premières fissures

Alors que la nouvelle convention ne sera mise en application qu’à partir du 1er avril 2019, nous voyons déjà apparaître les premières fissures dans le  projet présidentiel, reste à charge zéro, avec notamment le retour de la problématique chronique de la mise en place du tiers payant obligatoire ou intégral (ou bientôt 100% santé?) pour les actes du panier RAC zéro en  particulier.

En effet, interrogée  dans le cadre des discussions en cours concernant le PLFSS 2019 au sein de la Commission des affaires sociales du Parlement, Agnès Buzyn s’est prononcée pour la mise en place d’un Tiers Payant Généralisé à caractère obligatoire sur les prothèses dentaires dites à « Reste à Charge zéro ». Le moins que l’on puisse dire est que nous avions largement anticipé cette déconvenue supplémentaire contrairement à certains “ravis”  de la profession. A Lire

Mme Agnès Buzyn a ainsi énoncé en réponse à une question sur l‘obligation du TP :  « Madame Biémouret, vous avez raison, pour que la réforme s’applique vraiment, il faudrait que les patients n’aient même pas à avancer les frais et que le tiers payant leur soit accessible. Vous le savez, si nous avons renoncé au tiers payant généralisé (ndlr: novembre 2017), c’est d’abord pour des raisons techniques. Nous travaillons avec l’ensemble du secteur pour l’encourager. J’ai demandé à ce que des travaux spécifiques soient menés parallèlement au comité de pilotage du tiers payant, afin de prioriser la facturation des soins et des équipements du panier 100 % santé. J’ai bien conscience que, si nous voulons réussir la réforme, il faut non seulement que tous les secteurs concernés soient bien couverts, mais également que le tiers payant soit accessible prioritairement pour le panier de soins 100 % Santé : nous y travaillons. Dès lors que les travaux auront abouti, l’application du tiers payant intégral sera facilité dans ce secteur et pourra se généraliser ; c’est ce que je souhaite. »

Nous voilà  fixés : dès que les solutions techniques auront été trouvées,  et que le RAC zéro aura été rendu obligatoire à l’application pour les mutuelles (en janvier 2020),  le TPG devra être appliqué par tous les chirurgiens dentistes. Encore un principe fondamental du Code de la Santé Publique qui tombe, à savoir le paiement direct entre un patient et son praticien.
Le cheval de Troie est donc en place afin que l’ensemble de nos actes, pour l’instant limités à ceux  du panier RAC zéro, soient eux aussi également soumis à ce TPG. La boucle sera bouclée et les adorateurs de la signature conventionnelle auront bien voulu être bernés une fois de plus.

L’autre  point délicat à aborder, et qui concerne l’ensemble des français, est l’augmentation conséquente des cotisations annuelles de leur complémentaire santé pour « amortir » la mise en place de ce projet RAC zéro. Les avertissements envoyés par les dirigeants des groupes mutualistes et assurantiels ne sont pas rassurants et une hausse conséquente (de 10 à 30%) des cotisations semble inévitable.

Et que répond notre Ministre de tutelle à la question qui fâche:  «  Que comptez vous faire si les mutuelles ne jouent pas le jeu ? »
La réponse en vidéo n’est pas faite pour rassurer… Regarder la vidéo

Effectivement, la question d’une ingérence  éventuelle de l’Etat dans l’exécution des contrats d’assurance privés n’est pas envisageable.  La pirouette rhétorique de notre ministre démontre son incapacité et impuissance à empêcher une inflation inéluctable de nos cotisations.

Au constat de ces réalités politiques, la FSDL se félicite de ne pas  cautionner par sa collaboration dans les différents groupes de travail conventionnels,  la mise en place de mesures amplificatrices du déclin des conditions de notre exercice libéral  et de la qualité des soins. Laissons les syndicats minoritaires sous entendre qu’ils obtiendront des avancées, alors que tout est écrit à l’avance, changer de nom ou de logo afin de se racheter une virginité perdue ou mieux sortir du cabinet de la Ministre en étant rassurés par l’obtention de “garanties” orales.

Les consœurs et et les confrères qui viennent de recevoir leur notification de régularisation de cotisations URSSAF, avec une hausse jamais vue auparavant, apprécieront qu’on ose  leur demander 350 euros pour se former à une convention qui fera passer une extraction d’une dent de 33,44 euros à 39 euros. Poussant le cynisme jusqu’à ses limites, ces syndicats ne défendent plus la profession depuis belle lurette mais deviennent des prestataires de services, en réponse à des contraintes qu’ils ont eux-mêmes accepté de mettre  en place.

C’est la raison pour laquelle, il est nécessaire de ne pas se disperser et de  se fédérer autour de la FSDL qui défend encore certaines valeurs et qui aura la possibilité, en devenant majoritaire de façon absolue  aux prochaines élections URPS, de reprendre activement les discussions.

 

Patrick SOLERA
Président de la FSDL