Portrait et interview de Thomas Fatôme
SALECK.Isabelle, le 14 avril 2023
A la veille de la 1ère séance de négociations conventionnelles la FSDL s'est entretenue avec Thomas Fatôme
Certains noms reviennent plus fréquemment que d’autres dans l’actualité sanitaire et sociale de notre pays.
C’est notamment le cas de Thomas Fatôme.
Il est directeur général de la Caisse nationale de l’Assurance Maladie (et de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie) depuis le 17 août 2020.
Cette année, il devra piloter pour la première fois les négociations conventionnelles des chirurgiens-dentistes qui débuteront le 14 avril 2023 suite à la dénonciation de la reconduction tacite de la convention de 2018 par la Fédération des syndicats dentaires libéraux.
Qui est Thomas Fatôme ?
Diplômé d’HEC, titulaire d’un diplôme d’études approfondies (DEA) de droit public et ancien élève de l’Ecole nationale d’administration (ENA), Thomas Fatôme, 48 ans, a rejoint l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) à sa sortie de l’ENA en 2000.
Après avoir été conseiller technique dans les cabinets des anciens ministres chargés de la santé, Jean-François Mattei puis Philippe Douste-Blazy et, dans le même temps, de son secrétaire d’Etat à l’assurance maladie, Xavier Bertrand (avril 2004-avril 2005), Thomas Fatôme a rejoint la Cnam en avril 2005 en tant que directeur de cabinet du directeur général d’alors, Frédéric van Roekeghem.
Thomas Fatôme a ensuite dirigé entre mars 2008 et octobre 2009 le cabinet de l’ancien secrétaire d’Etat chargé de l’emploi, Laurent Wauquiez, et assuré la direction adjointe du cabinet de la ministre de l’économie, de l’emploi et de l’industrie, Christine Lagarde, avant de rejoindre la direction de la sécurité sociale (DSS) en tant que chef de service.
Puis il a été nommé en novembre 2010 conseiller chargé de la santé, de la dépendance et des politiques sociales au cabinet de Nicolas Sarkozy, avant d’être promu conseiller à la présidence de République en mars 2011.
Il assurera ensuite la direction de la sécurité sociale de janvier 2012 à juin 2017, avant de rejoindre l’équipe du premier ministre, Edouard Philippe, dont il a été directeur de cabinet adjoint jusqu’en juillet 2020, date de la nomination de Jean Castex à Matignon.
Il prendra ses fonctions de directeur général de la Cnam/UNCAM le 17 août 2020, poste qu’il occupe depuis cette date, succédant à Nicolas Revel.
Il a été promu au grade de chevalier de la l’ordre nationale de la Légion d’honneur au titre de la promotion du 1erjanvier 2023.
Ce parcours témoigne d’un engagement fort sur les sujets ayant trait à la santé et à la protection sociale.
A l’aube de l’ouverture de nos négociations conventionnelles, posons-lui quelques questions.
Questions
– Depuis votre prise de fonction, quelle a été la décision la plus difficile à prendre? Pouvez-vous nous expliquer en quelques mots pourquoi.
La décision la plus difficile à prendre a probablement été celle de basculer l’ensemble du réseau de l’Assurance Maladie en PCA (Plan de Continuité de l’Activité) début 2022, en raison du variant Omicron. Avec ce sentiment de ne jamais revenir à un fonctionnement normal.
– Depuis votre prise de fonction, quelle est la décision dont vous êtes le plus fier? Pouvez-vous nous expliquer en quelques mots pourquoi.
En janvier 2021, j’ai eu l’idée de proposer à toute personne testée positive au Covid-19 la visite d’un infirmier à domicile. Cette mesure a été mise en œuvre en trois semaines et déployée grâce à forte adhésion des représentants des infirmiers, à la mobilisation de la profession et bien sûr, du réseau de l’Assurance Maladie pour déployer ce dispositif.
– Alors que de nouvelles négociations conventionnelles vont s’ouvrir avec notre profession, quelles sont vos ambitions pour cette convention ?
Je souhaite une amélioration durable de la santé bucco-dentaire de nos assurés pour les années à venir.
En effet, des progrès importants ont été réalisés au cours des dernières années grâce à l’engagement des chirurgiens-dentistes au travers de la mise en œuvre de la convention nationale signée en 2018 et de ses avenants : mise en place du dispositif 100% santé dentaire avec un plafonnement progressif des tarifs des soins prothétiques, revalorisation importante des soins conservateurs, mise en place de mesures pour favoriser l’accès aux soins des patients fragiles, notamment en situation de handicap, et renforcement des dispositifs de prévention bucco-dentaire. Ces premières avancées doivent encore être consolidées.
Dans cet objectif et conformément à la lettre de cadrage de ces négociations transmise par le ministre de la Santé et de la prévention, je souhaite opérer, par cette convention dentaire et en partenariat avec les syndicats représentatifs de la profession, un véritable changement en passant d’une approche curative à une approche préventive des soins dentaires. Cette ambition pourrait se traduire notamment par un renforcement des soins de prévention et conservateurs, ainsi qu’un usage plus juste des soins prothétiques et implantaires.
Nous pourrons ainsi travailler à une évolution des conditions de prise en charge des actes bucco-dentaires en vue d’adapter ces prises en charge aux évolutions des pratiques, et permettre de se rapprocher de l’objectif de la convention de 2018 visant à rééquilibrer l’activité des chirurgiens-dentistes vers davantage de soins conservateurs et moins d’actes prothétiques.
Par ailleurs, les partenaires conventionnels pourront identifier les leviers permettant d’améliorer l’accès à un chirurgien-dentiste en particulier dans les zones rurales où, comme nous pouvons le constater, la population rencontre des difficultés d’accès croissantes aux soins dentaires.
De plus, nous pourrons réfléchir aux actions à initier pour favoriser la prise en charge de certains publics fragiles qui connaissent des difficultés pour accéder à des chirurgiens-dentistes ou dont le suivi doit être particulièrement renforcé. Je pense notamment aux enfants, aux patients résident en EHPAD ou en structures médico-sociales ou encore aux patients atteints de maladies rares à répercussion bucco-dentaire.
– Dans ses voeux aux acteurs de la santé le 6 janvier dernier, le Président de la République déclarait vouloir « améliorer la prévention ». La FSDL est très attachée à atteindre un objectif de « 0% caries ». Augmentation du nombre d’examens de prévention? Tout au long de la vie? Obligatoires? Quelle est votre position sur ce sujet? Vos éventuelles pistes?
Je suis également très attaché comme évoqué précédemment à opérer un véritable changement en passant d’une approche curative à une approche préventive des soins dentaires. Si nous avons identifié certains leviers, les propositions concrètes devront être construites en collaboration avec les représentants de la profession lors des négociations de la prochaine convention dentaire.
*Crédit photo : Julie Bourges