Un chirurgien-dentiste élu au Sénat

SALECK.Isabelle, le 1 février 2024

 

 

 

Raphaël DAUBET, chirurgien-dentiste, a été élu sénateur du Lot (région Occitanie) le 24 septembre 2023. Il est par ailleurs, Maire de Martel, Conseiller départemental du Lot et Président de la communauté de communes Causses et Vallée de la Dordogne.

 

 

 

 

Monsieur le sénateur, comment en êtes-vous arrivé à la politique locale ?

Je viens d’une famille où l’engagement républicain est une culture et une tradition. Mon grand-père était maire avant moi par exemple. C’est donc tout naturellement que je me suis présenté aux élections municipales de mon village il y a 15 ans. Rapidement, je suis devenu maire, conseiller régional, vice-président de la communauté puis président, maire du chef-lieu de canton et conseiller départemental. La chance m’a toujours souri aux élections, et je dois reconnaître que ma profession de chirurgien-dentiste a été un atout.

Mais j’aime surtout l’action publique, ma terre, et les gens qui la peuplent. Je crois aussi que les professions libérales, notamment médicales, ont un rôle à jouer dans la cité. Je considère que nous avons une responsabilité particulière à l’égard de la collectivité, en vertu de ce que nous représentons, et de nos liens privilégiés avec la population.

Pourquoi avez-vous souhaité mettre un pied dans la politique nationale et être investi, puis élu, sénateur ?

J’ai eu l’opportunité de siéger dans toutes les instances locales et régionales. Je connais parfaitement les rouages et le fonctionnement des institutions, et il faut croire que mon action passée a convaincu mes pairs pour qu’ils m’élisent au Sénat. C’est le prolongement naturel de cet engagement local.

Vous êtes membre de la commission des finances alors qu’en tant que professionnel de santé on aurait pu vous attendre plus naturellement dans la commission des affaires sociales. Pourquoi ce choix ?

La commission des finances est une commission prestigieuse. J’ai de la chance de pouvoir y siéger. Mais c’est surtout une commission très transversale, à laquelle sont soumis tous les choix et toutes les décisions de l’État, y compris les politiques de santé. Donc je serai directement en prise avec de nombreux sujets, dont la santé.

Et puis j’ai appris dans ma vie politique qu’on n’est pas forcément le meilleur décideur dans les domaines où l’on est un expert. La réflexion politique nécessite souvent du détachement et de la créativité, pour changer les choses, pour réformer. Les bonnes idées naissent souvent de la confrontation de disciplines qui s’ignorent le reste du temps.

Alors j’aime bien être là où l’on ne m’attend pas !

Malgré ce choix, comment allez-vous aborder les sujets relatifs à la santé et à la protection sociale ? Resterez-vous actif sur ces sujets ?

Bien sûr ! Ces questions sont majeures pour notre pays, pour le monde urbain comme pour les territoires ruraux. En tant que sénateur, j’ai une totale liberté pour participer aux débats dans l’hémicycle, sur tous les sujets. J’ai la possibilité de déposer des amendements, des propositions de loi, de faire des rapports ou des commissions d’enquête parlementaire. Je serai vigilant à toutes les évolutions législatives concernant la santé.

En tant que chirurgien-dentiste, est-ce que vous vous interdirez par principe de vous intéresser à la profession et aux problématiques des chirurgiens-dentistes ? Ou bien voulez-vous au contraire que votre mandat de sénateur vous permette de faire parfois écho aux sujets relatifs à la santé bucco-dentaire ?

J’aime profondément mon métier et je souhaite intervenir sur tous les textes qui pourraient le concerner directement ou indirectement, selon mes appréciations et mes valeurs, et toujours dans l’intérêt général. L’évolution de la santé bucco-dentaire de nos concitoyens me préoccupe énormément, de même que la répartition de l’offre de soins dans notre pays.

Si vous deviez vous emparer aujourd’hui d’un seul sujet relatif à la profession dentaire et/ou aux soins bucco-dentaires, lequel choisiriez-vous et pourquoi ?

La formation universitaire. Je la trouve socialement injuste, inégalement répartie sur le territoire national, et insuffisante en nombre de places.

J’ai créé dans mon département la première Option Santé en milieu rural, au lycée de Saint-Céré, pour accompagner les jeunes dès le lycée vers les études médicales, leur donner confiance, et l’ambition de réussir. Ce dispositif a servi d’exemple. Il est désormais reproduit en de nombreux endroits du territoire national. Nous avons aussi mis en place, avec la communauté que je présidais, Cauvaldor, un système de bourses et d’accompagnement humain tout au long des études, dès la première année.

Actuellement, la FSDL est très préoccupée par le nombre d’étudiants français qui partent se former à l’étranger, notamment en Espagne et au Portugal. En 2022, le nombre de primo-inscrits au tableau de l’Ordre, diplômés hors de France (1313 praticiens) a dépassé pour la première fois celui des primo-inscrits issus de la filière française odontologique (1 294 praticiens). Parmi les conséquences envisageables ou déjà perceptibles, celle de la fragilisation de la filière de formation française ou encore une hyperconcentration de ces nouveaux diplômés en Île-de-France ou dans le sud-ouest de la France lors de leur installation au détriment de zones en plus grands besoins. Que pensez-vous de cette situation ?

C’est exactement le constat que je fais. Les responsabilités sont partagées et peu importe comment on en est arrivé là. Mais on ne peut pas laisser perdurer cette situation. C’est impensable dans un pays comme la France. Nous devons être fiers d’avoir une formation universitaire d’excellence, veiller à ce qu’elle reste gratuite, l’ouvrir à plus de jeunes pour répondre aux besoins de la population, et faire en sorte que les étudiants proviennent de tous les départements : de la ville, des banlieues, de la campagne ou de la montagne…

C’est ainsi qu’on démocratisera l’accès à notre profession, et qu’on favorisera la dispersion des praticiens dans les territoires.


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