Régulation conventionnelle ou régulation législative ?
SALECK.Isabelle, le 21 octobre 2024
Les législateurs remettent le couvert sur le sujet de la contrainte d’installation en proposant une loi avec pour objectif de « lutter contre les déserts médicaux et garantir l’accès aux soins partout sur le territoire » : cette proposition de loi concernerait les médecins et les chirurgiens-dentistes.
Ainsi, nous remarquons, avec un certain abasourdissement, que nos représentants politiques méconnaissent l’existence de cette régulation déjà régie par voie conventionnelle : quand les strates administratives et politiques semblent être imperméables les unes aux autres…
Rappelons que la convention 2018-2023, signée par les syndicats CDF et UD, validait déjà dans son article 3.1 le principe du conventionnement sélectif des chirurgiens dentistes, libéraux exclusivement :
“Article 3.1 Dispositif d’incitation à l’installation et au maintien dans les zones «très sous-dotées» Les parties signataires souhaitent parvenir à une meilleure répartition de l’offre de soins dentaires sur le territoire afin de garantir une réponse adaptée aux besoins sanitaires de la population. Les parties signataires estiment nécessaire, par des mesures structurantes, de privilégier l’implantation des chirurgiens-dentistes libéraux dans les zones «très sous-dotées» et de favoriser le maintien de l’activité des chirurgiens-dentistes qui y sont d’ores et déjà installés.”
La « vie conventionnelle » est gérée pendant ses 5 ans de validité par :
- des avenants, présentés à l’ensemble des syndicats représentatifs
- des réunions en Commission Paritaire Nationale (CPN), auxquelles sont conviés uniquement les syndicats signataires.
Rappelons également qu’à la suite des élections URPS 2021, des deux syndicats signataires, seuls les CDF ont conservé leur caractère représentatif, aboutissant à une position d’influence unilatérale auprès de l’UNCAM. Ils étaient alors seuls présents en CPN, de 2021 à 2023, lorsqu’est abordée notamment la mise en œuvre de l’article 3.1.
En septembre 2022, la FSDL s’est opposée à la tacite reconduction de la convention en cours, l’UNCAM se trouvant alors dans l’obligation de proposer une nouvelle convention :un statu-quo n’était pas envisageable. De nouvelles négociations conventionnelles ont donc été entamées avec la FSDL et CDF, seuls syndicats représentatifs désormais.
La question de la régulation de l’installation des chirurgiens-dentistes a été omniprésente dans notre prise de décision de signature de cette nouvelle convention : il était impératif de prendre en compte le contexte législatif de l’époque sur ce sujet (proposition de loi d’origine transpartisane du 17 janvier 2023). La régulation (coercition) de l’installation apparaissait déjà aux législateurs comme la seule solution possible au problème de la difficulté d’accès aux soins de la population française. Un constat d’échec, assurément, de plus de 30 ans d’errements et de mauvaise gestion de la politique de Santé.
Le renouvellement de cette proposition de loi ce 15 octobre 2024 en est la preuve : nul doute que l’ensemble des professionnels de santé sont dans le viseur.
L’intervention de la FSDL, lors de ces dernières négociations conventionnelles, et sa signature de la convention, ont permis sur le sujet de la régulation des installations :
- L’intégration des centres de santé associatifs dans cette mesure de régulation du conventionnement (ce que n’intégrait pas la convention précédente) : la défense de l’exercice libéral passe aussi par un équilibre dans la répartition juste des contraintes à tous les types d’exercice.
- Un travail sur les indicateurs pris en compte dans le calcul et la définition des zones non prioritaires (ZNP)
- Une augmentation des marges de discussion régionalement avec les ARS dans la définition des ZNP
- Une intégration des cadres de la FSDL dans les CPN, CPR (régionales) et CPD (départementale), véritables commissions de travail et de négociation de la « vie conventionnelle ».
« Les portes de l’avenir sont ouvertes à ceux qui savent les pousser » (J. Chirac).
La FSDL a pris la décision courageuse d’exécuter pleinement le mandat qui lui a été confié par la profession lors des élections URPS 2021. Et ce, en gardant toujours à l’esprit le contexte politique et les intérêts propres aux chirurgiens-dentistes libéraux.