Arrêt du Conseil d’Etat du 5 juillet 2022 : il ne peut y avoir de poursuites disciplinaires si le professionnel a agi dans les règles et de bonne foi.
(Décision portant sur un médecin mais parfaitement transposable à un chirurgien-dentiste)
Rappel des faits :
En 2017, un médecin d’un centre médico-psychologique pour enfants et adolescents a alerté la cellule départementale de recueil, de traitement et d’évaluation des informations préoccupantes (CRIP) au sujet d’un enfant susceptible d’être l’objet de maltraitances psychologiques par sa mère. Âgé de 9 ans, cet enfant était pris en charge dans ce centre, à la suite d’une première information préoccupante transmise quelques mois plus tôt par d’autres professionnels de santé. Cet enfant a été placé par le juge des enfants, après le signalement de ce médecin.
La mère de l’enfant a décidé de porter plainte contre le médecin auprès de la chambre disciplinaire de première instance de l’ordre des médecins territorialement compétente pour le signalement qu’il avait effectué.
La chambre disciplinaire a rejeté sa plainte en 2019, une décision confirmée en appel par la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins en 2020. La mère de l’enfant a alors saisi le Conseil d’État en cassation.
La décision :
Le Conseil d’Etat a rappelé que « lorsqu’un médecin signale au procureur de la République ou à la cellule de recueil, de traitement et d’évaluation des informations préoccupantes des faits laissant présumer qu’un mineur a subi des violences physiques, sexuelles ou psychiques et porte à cet effet à sa connaissance tous les éléments utiles qu’il a pu relever ou déceler dans la prise en charge de ce jeune patient, notamment des constatations médicales, des propos ou le comportement de l’enfant et, le cas échéant, le discours de ses représentants légaux ou de la personne accompagnant l’enfant soumis à son examen médical, sa responsabilité disciplinaire ne peut être engagée à raison d’un tel signalement, s’il a été effectué dans ces conditions, sauf à ce qu’il soit établi que le médecin a agi de mauvaise foi ».
Puis il a jugé que le signalement adressé à la CRIP sur le fondement de l’article 226-14 du code pénal procédait des constatations que le médecin avait effectuées en recevant en consultation l’enfant et sa mère et que le praticien avait agi de bonne foi afin de protéger l’enfant.
En synthèse, le Conseil d’État précise que, comme le prévoit la loi, un professionnel ne peut être poursuivi devant les juridictions disciplinaires à raison d’un signalement de maltraitance d’un mineur lorsqu’il a fait son signalement conformément aux termes de la loi et qu’il a agi de bonne foi.